RÉVÉLATION
Les couleurs de la ville
Claude Lorent
Le LAAC de Dunkerque a passé
commande au célèbre photographe américain William Egglestone pour un reportage
L'exposition est un coup de
génie du LAAC qui ne risque pas de se reproduire fréquemment: le très célèbre
photographe américain William Egglestone (Etats- Unis, 1939, Memphis où il vit et
travaille) a répondu positivement à une commande. Résultat? Une exposition de quarante
photographies inédites dressant un portrait de la ville portuaire de Dunkerque, dans le
Nord- Pas de Calais, à quelques brasses de la Belgique.
Exceptionnel quand on sait que
l'artiste répond rarement à des commandes et que l'on connaît la qualité de l'oeuvre
d'un des pionniers de la photographie artistique en couleur.
Plusieurs expositions
précédentes l'ont montré, William Egglestone est un très fin observateur des traces
significatives des caractéristiques d'une société donnée, en l'occurrence
généralement celle de l'Amérique profonde, et de son évolution dans le temps. Et son
style, sobre, posé, appuyé par une esthétique recherchée autant qu'éminemment
structurée, s'est imposé comme valeur de référence. Il en use sans en abuser,
parvenant à l'adapter à la variété des sujets abordés, de l'architecture urbaine à
celle industrielle, du détail paysager singulier à celui d'un instant de vie
quotidienne.
Ce qu'il propose sur Dunkerque
ne sort point de ce registre tout en étant très strictement conforme à la cité
portuaire, industrielle et balnéaire. Et ses petits formats sont, comme d'habitude, de
mise et dament le pion à bien des contemporains adeptes des images léchées et
monumentales qui en jettent mais passent.
Aucun cliché carte postale,
ni dans les sujets, ni dans les couleurs, autre signature indélébile de l'Américain,
qui s'approprie la ville afin de la révéler aux citoyens qui croient la connaître. La
maîtrise de la lumière est son atout pour saisir les tonalités inédites et nuancées.
Et sous ce regard, Dunkerque reprend vie car chaque image est une mise en valeur, un appel
à voir sous un angle et un jour neufs et pourtant on ne peut plus réels.
Egglestone crée
l'ambiance par les couleurs, il revitalise ce qui pourrait paraître banal, anodin, voire
délaissé. On pourrait croire qu'il réinvente la ville alors qu'il a simplement capté
les éléments les plus révélateurs d'un présent souvent héritier d'un passé, et en
tout cas d'un avenir. Ce Dunkerque-là affiche ses couleurs avec fierté.
© La Libre Belgique 2006